Qu'est-ce que la philosophie? (explication des textes de Schopenhauer et Gramsci) )

Publié le par lenuki




Texte de Schopenhauer

 

 

Thème : L’homme et la métaphysique.

 

Thèse : Seul l’homme s’étonne de sa propre existence, car il est doué de raison et de

             réflexion, et c’est pourquoi on peut le définir comme animal métaphysique.

 

Parties : I. « Excepté l’homme… plus ou moins évidente » = la nature, de l’inconscience à la 

               conscience, par l’intermédiaire de l’homme.

               II. L’homme comme animal métaphysique : « De cette réflexion et de cet

               étonnement en soi et pour soi ».

               III. « Au contraire… se comprendraient d’elles-mêmes » : la spécificité et les

               caractéristiques de l’étonnement philosophique.

 

I. L’homme est un être à part dans la nature car seul  il s’étonne de sa propre existence.

Les autres êtres vivants sont complètement intégrés à la nature, ce dont témoigne l’évolution de celle-ci, de l’inconscience des deux règnes (minéral et végétal) en passant par la conscience limitée de l’animal, jusqu’à la conscience humaine, fondée sur la raison, qui produit la réflexion.

Ainsi la nature se réfléchit-elle dans la conscience que l’homme prend de son existence, par laquelle il se distingue de la nature elle-même (cf. dualité ci après). Enfin, cette conscience de soi est conscience temporelle, conscience de la finitude, d’où le « à quoi bon ? » (agir, entreprendre, etc. …).

 

II. En quoi consiste le besoin métaphysique de l’homme ? En effet, s’étonnant d’être, l’homme est un animal métaphysique. (Cf. la question métaphysique par excellence « pourquoi y a-t-il de l’être plutôt que rien ? » [Leibniz]).

Mais cet étonnement ne s’éveille que progressivement, lorsque l’homme prend conscience d’une différence entre lui-même et tout ce qui l’entoure, qui lui apparaît comme étranger, voire hostile.

D’où la référence à Aristote, mettant en évidence le rapport entre étonnement et naissance de la philosophie.

D’où (aussi) la distinction entre l’étonnement philosophique, qui porte sur l’habituel devenant étrange et l’étonnement du savant, qui porte sur des phénomènes rares, mais explicables.

Enfin, l’étonnement suppose un certain degré d’intelligence, permettant la différenciation entre soi et le monde, ce qui se nomme proprement réflexion, ou entre le spectateur et l’acteur, l’un étant en dehors tandis que l’autre est pleinement dans le monde.

Réflexion qui implique un dédoublement de l’existence entre en soi et pour soi (cf. Hegel).

 

III. Spécificité de l’étonnement philosophique : il résulte de cette dualité (en soi / pour soi) et d’un certain degré d’intelligence (comme faculté d’analyse et de compréhension).

Etonnement qui s’enracine dans le tragique de la condition humaine, marquée par la finitude (l’homme se sait mortel) , par l’absurde (tout cela a-t-il un sens ?) et par la douleur (qui selon Schopenhauer est le fond de la réalité).

D’où l’idée que si l’homme était pleinement heureux, il ne philosopherait pas (cf. aussi Epicure)… car il serait totalement en phase avec tout ce qui est.

 

 

En quel sens peut-on dire qu’il est un animal métaphysique ?

 

Est métaphysique ce qui se situe au-delà de la physique, c’est-à-dire de ce qui est donné, inné et qui renvoie à ce qu’est un être naturellement. On peut donc dire que la métaphysique concerne toutes les réalités et les expériences qui permettent de dépasser le seul point de vue de la nature humaine. Or la question évoque l’homme comme animal métaphysique ce qui semble paradoxal puisque le propre d’un animal, c’est qu’il se contente de suivre la nature et son instinct, sans jamais aller au-delà. Si donc l’homme est un animal, une attitude métaphysique le fait justement sortir de son animalité. Or quelle expérience mieux que celle de la mort (par la conscience que l’homme en prend à la troisième ou seconde personne) et celle de la douleur (tragique de l’existence) est-elle à même de mettre en évidence cette vocation métaphysique ? Peut on faire l’économie d’une réflexion sur l’origine du monde, l’existence de l’âme (immortalité) ou celle de Dieu ? Ne sont ce pas des questions fondamentales pour l’homme, qui a besoin de donner du sens, même et surtout à ce qui semble ne pas en avoir ? Et même si ces interrogations restent des interrogations, la pensée n’y est-elle pas sans cesse ramenée ?

D’où cette formule de Kant «  On reviendra toujours à la métaphysique comme auprès d’une vieille maîtresse qu’on avait abandonnée. »…!





Texte de Gramsci

 

 

 

Thème : Un préjugé concernant la philosophie.

 

Thème : « Il faut détruire le préjugé… ayant un système philosophique ».

 

Gramsci s’oppose à un préjugé concernant la philosophie, selon lequel elle serait difficile et affaire de spécialistes, c’est-à-dire hors de portée de la majorité des hommes. Or, selon lui, la  philosophie n’est pas inaccessible. Bien évidemment, il ne s’agit pas de la philosophie académique ou universitaire. Mais pour détruire ce préjugé, il faut procéder en plusieurs étapes :

 

I.  Tout le monde est philosophe.

 

Montrer, d’abord, que sans le savoir les hommes sont d’emblée au contact de la philosophie. Il est donc inutile de faire de longues études pour commencer à philosopher, puisque tout le monde pratique déjà d’emblée une certaine philosophie, que Gramsci nomme « spontanée ».

Puis définir où est contenue cette philosophie « spontanée » :

  • dans le langage, qui véhicule une conception du monde, c’est-à-dire, au-delà des mots, du sens.
  • dans le sens commun (ce que chacun a tendance à penser, au sein d’une société donnée) et le bon sens (plus semblable à ce que Socrate nommait opinion droite).
  • dans tout système de croyances auquel nous adhérons en vertu de l’éducation reçue, du milieu social auquel nous appartenons, etc. …

Tout le monde est donc philosophe, mais de manière inconsciente, ce qui constitue un paradoxe, si la philosophie (cf. Kant) se définit par la critique et la réflexion.

 

II.  Pas de philosophie authentique sans critique ni conscience.

 

Comme par hasard, ce moment se caractérise par une question formulée sous forme d’alternative, concernant le genre de philosophie préférable : la philosophie spontanée ou la philosophie critique.

a)      En rester à la philosophie spontanée, ne serait-ce pas se condamner à accepter une forme de pensée anonyme, propre au groupe social auquel on appartient et que l’on se contente de suivre, au risque de n’avoir aucune démarche cohérente, puisqu’il s’agit de se laisser bercer au gré des circonstances, et de dépendre de « tuteurs » plus ou moins bien intentionnés dans la conduite de notre vie (curé, ancêtre patriarcal, bonne femme un peu sorcière ou petit intellectuel aigri…) ?

b)      En revanche, accéder à la dimension critique de toute philosophie authentique, ne serait-ce pas reprendre la maîtrise de son existence, pour devenir acteur du processus historique, à partir d’une conception du monde produite par sa propre réflexion et s’inscrire consciemment dans une pratique réfléchie susceptible de transformer la réalité sociale (au lieu de la subir passivement comme si elle constituait un destin) ?

Publié dans philosophie générale

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