Le Droit naturel

Publié le par lenuki

LA NOTION DE DROIT NATUREL
Le droit naturel s’oppose au droit positif. Le droit naturel se donne comme un ensemble de règles ou de dispositions contraignantes fondées sur la nature. On y voit souvent une sorte de code moral dont on extrait des normes indépendantes de tout droit positif et qui, en s’imposant universellement à tous, répond à l’exigence d’échapper à l’arbitraire du jugement humain. Le droit positif est le droit en vigueur, créé et appliqué par les hommes, le droit en tant qu’il s’inscrit dans la réalité. Une constitution, un code du travail, une loi édictée par l’ Etat relèvent du droit positif. Par définition le droit positif est changeant, mobile, variable. Il accompagne l’évolution des coutumes et des mœurs de telle ou telle société. A l ‘inverse, le droit naturel, fondé sur l’idée d’immuabilité de la nature, vise à établir une norme de justice qui échappe aux variations de l’histoire et aux fluctuations des mœurs.Cependant la détermination du contenu du droit naturel dépend de l’idée que l’on se fait de la nature et donc varie suivant les époques.
Les Grecs et les Romains usaient d’un seul et même mot pour désigner le juste et le légal, en grec dikaion ou en latin jus. L’idée qu’un droit puisse dériver de la nature est ancienne, elle s’est rapidement trouvée opposée à celle que seule la convention, l’accord entre les hommes, pouvait être à l’origine de l’obligation juridique.
Antiquité grecque
La pensée politique des sophistes, qui opposaient la nature à la loi (phusis/nomos), est l’expression de ce conflit. On ne saurait, selon certains d’entre eux, chercher le principe d’une obligation quelconque dans la nature. Le monde de la nécessité naturelle ne saurait être fondateur d’aucun droit contraignant, la force de la nécessité naturelle n’ayant pas besoin d’être légitimée pour s’imposer à tous. Toutefois, les sophistes ne donnent pas tous le même sens à cette opposition de la nature et de la loi. Les uns, à la manière de Calliclès dans le Gorgias de Platon, concluent à une sorte de naturalisme politique : la justice naturelle est celle qui permet au fort de dominer le faible et donc le droit de nature est le droit du plus fort. D’autres, comme Antiphon, semblent mettre en avant l’idée que les conventions seules sont génératrices d’obligations, donc de droit. Platon rejette tout positivisme juridique et une loi injuste ne mérite pas le nom de loi. Il y a donc au fondement et au but de tout droit l’idée de justice qui doit s’exercer aussi bien individuellement que politiquement. L’art du juriste consiste à distinguer ce qui est juste de ce qui ne l’est pas, ce qui implique davantage une éducation philosophique que proprement juridique. Le droit tel qu’il est conçu par Platon est plutôt de l’ordre du droit idéal que du droit naturel. Aristote, dont de nombreux auteurs disent de lui qu’il est le père du droit naturel, n’établit pas de coupure nette entre droit naturel et droit positif. Il pose que l’homme est par nature un zoon poltikon « animal politique »(Politique, I, 2) : sa nature ou son essence le destine à vivre dans la communauté de la cité. Par là, Aristote ne constatait pas tant un fait de la nature, puisqu’il y a des hommes qui ne vivent pas dans une polis ou qui sont privés d’existence civique, qu’une nécessité qui lui paraissait pouvoir être tirée de la nature même de l’homme. Celui-ci ne peut se réaliser, s’accomplir en tant qu’homme, que dans le cadre de la cité entendue comme une communauté politique, ce qui exige l’institution de lois positives conformes à la nature spécifique de chaque peuple. Il fait procéder le droit de l’étude de la nature. Il en va ainsi de la nature de l’homme dont la fin (le bonheur) exige la réalisation de certaines normes d’équilibre (la vertu) ; et de la nature de la cité, dont la fin exige que tous soient traités également. La définition aristotélicienne de la vertu de justice, à savoir attribuer à chacun la part qui lui revient, a le mérite de répondre à la fois à l’exigence théorique de fonder la justice sur autre chose que sur le jugement arbitraire des hommes et à l’exigence pratique de tenir compte dans le jugement des circonstances concrètes de l’action.
Antiquité romaine
Dans sa République (vers 51 av. J.-C.), Cicéron ne parle pas expressément de droit naturel. Il développe l’idée de loi naturelle (lex naturalis). A la différence de la loi positive, la loi naturelle est une loi non écrite et innée qui s’identifie à la droite raison : « il existe une loi vraie, c’est la droite raison, conforme à la nature (natura congruens), répandue dans tous les êtres (diffusa in omnes), toujours d’accord avec elle-même, non sujette à périr (sempiterna) qui nous appelle à remplir notre fonction, interdit la fraude et nous en détourne » L’on ne peut parler de droit naturel que dans la mesure où la nature s’accorde avec la raison.
Les juristes latins éprouvèrent le besoin de consigner dans des compilations leur pratique juridique. C’étaient des recueils d’opinions discordantes permettant de mettre en perspectives les décisions juridiques. Il faudra attendre Ulpien, un jurisconsulte romain du III è siècle après J.-C., pour qu’on donne une première définition juridique du droit naturel qui s’étend à l’ensemble des êtres vivants : « le droit naturel, c’est ce que la nature a appris à tous les être animés » Paul, autre jurisconsulte, définit comme suit l’idée de droit naturel : « jus peut désigner cela qui est toujours juste et équitable, comme le droit naturel (jus naturale).
L’idée de droit naturel en monde chrétien
Pour Augustin (théologien, père de l’Eglise 354-430) la vraie justice est « toute intérieure », et « elle ne juge point des choses par les coutumes et les pratiques extérieures, mais par la rectitude immuable de la loi éternelle de ce Dieu tout-puissant » (Confessions, III,7) La justice se confond avec la volonté divine. Toutes les lois profanes sont essentiellement injustes. Au sens strict, le jus humanum, le droit fait par les hommes et pour les hommes, n’est pas un droit. Cependant, Augustin n’en professe pas moins la nécessité d’obéir aux lois imparfaites de la cité terrestre afin de conserver la paix civile. L’essor de la scolastique (XIII è siècle), en contribuant à libérer les sciences profanes de la tutelle de la théologie, a rendu possible la renaissance de l’idée de droit naturel classique. Thomas d’Aquin, reprenant à son compte la tradition de l’aristotélisme et du droit romain, propose une synthèse dans laquelle le droit naturel suppose l’observation des faits et des mœurs.
EPOQUE MODERNE
Elle est marquée par la naissance du droit subjectif , par la primauté accordée à la notion d’individu. Cette primauté a entraîné l’éclatement du concept traditionnel de droit en deux sens distincts : le droit comme loi ou règle, simple licence de faire ou de ne pas faire quelque chose, et le droit comme pouvoir (potestas, dominium) de l’individu, comme « qualité morale, attachée à la personne, en vertu de quoi on peut légitimement avoir ou faire certaines choses » Se développent également les théories philosophiques ou juridiques de la notion d’état de nature et celle de contrat social. On y voit s’opposer l’état de société à un état de nature, historique ou fictif, originaire ou imaginaire, dans lequel l’individu, réduit à lui-même, vit selon le droit de nature. On se présente la sortie de cet état de nature comme la conséquence d’une sorte de pacte ou de contrat social, qui institue une nouvelle source de légitimité.
L’école moderne du droit naturel (Grotius et Pufendorf)
Soucieux de rationaliser le droit, ils insistent sur la nécessité de séparer le droit du fait, « comme les mathématiciens en examinant les figures font abstraction des corps qu’elles modifient » (Grotius) L’un et l’autre envisagent la nature humaine comme essentiellement sociable : inclination naturelle de l’homme à la vie en société. Grotius pense que le droit naturel procède de la nature de l’homme, qu’il considère comme sociable et raisonnable. Le droit naturel est donc dicté par la droite raison, et il serait valide « quand bien même Dieu n’existerait pas » Grotius a pour ambition de conférer à la doctrine du droit naturel le caractère d’une science a priori, indépendante de l’expérience, fondée sur des évidences que la raison ne saurait remettre en cause et auxquelles elle doit donner une forme systématique. Pufendorf considère que le droit naturel procède moins de la raison qu’il n’est connu par elle. Le principe général du droit naturel découle de la constitution naturelle de l’homme, à savoir sa sociabilité. Aussi, « la loi fondamentale du droit naturel : c’est que chacun doit être porté à former et à entretenir, en tant qu’il dépend de lui, une société paisible avec les autres »
Le droit de nature des philosophes (Hobbes, Locke, Spinoza )
Pour Hobbes qui considère que l’homme n’est pas naturellement sociable, le droit de nature se confond avec la liberté naturelle. « Le DROIT DE NATURE, que les écrivains politiques appellent communément jus naturale, est la liberté que chacun a d’user de sa propre puissance, comme il le veut lui-même pour la préservation de sa propre nature, autrement dit de sa propre vie et, par conséquent, de faire, selon son jugement et sa raison propres, tout ce qu’il concevra être le meilleur moyen adapté à cette fin » (Léviathan, chap. XIV)C’est donc la recherche de la sécurité qui porte la problématique hobbesienne du droit naturel. Ce droit à la sécurité individuelle persiste à l’état social : il est inaliénable. Hobbes distingue le droit naturel, défini par la liberté, de la loi naturelle, dictée par la droite raison et concernant les choses que l’on doit faire ou éviter pour la conservation de la vie.
Pour Locke, l’homme à l’état de nature est, comme pour Hobbes, isolé et indépendant à l’égard de ses semblables. Dans cet état, essentiellement caractérisé par la liberté, l’homme a « la parfaite liberté d’agir et de disposer de sa personne et de ses propriétés dans les limites de la loi de nature » Le droit naturel prend ainsi la figure d’une liberté rapportée au droit de propriété entendu au sens large. Par property, il ne faut pas seulement entendre la possession de biens matériels, mais aussi les actions que nous faisons, qui sont nôtres de droit, ou encore notre personne qu’on ne peut céder ni vendre. Ainsi Locke, anticipant Rousseau, considère-t-il qu’on n’a pas le droit de se vendre comme esclave.
Pour Spinoza, le droit naturel procède des rapports de puissance réels entre les individus : « les plus gros poissons mangent les plus petits d’un droit naturel souverain »
LE CONTRACTUALISME
Les théories du contrat social ont une double fonction : d’une part, il désigne l’acte par lequel se constitue la société civile, c’est le pacte d’association, d’autre part l’acte par lequel s’institue le gouvernement, c’est le pacte de sujétion ou de soumission. Hobbes considère que l’état de nature, caractérisé par le libre déchaînement des appétits, des passions individuels, ne peut se maintenir. Il arrive un moment où la compétition de chacun contre chacun, de guerre de tous contre tous, entraîne une situation où la peur de la mort violente rend la vie de chacun insupportable. Il faut alors « s’arracher à ce misérable état de guerre qui est [...]la conséquence nécessaire des passions naturelles des hommes », sachant que seule l’institution d’un pouvoir suffisamment fort pourra rétablir la paix. Ce pouvoir ne peut que résulter d’un contrat dans lequel chacun échange sa liberté naturelle contre la paix et la sécurité. C’est la fonction de la convention passée entre les sujets. Chacun s’engage à renoncer à toutes les prérogatives de sa liberté naturelle au profit d’un tiers, un homme ou une assemblée, auquel il reconnaîtra une entière souveraineté, à condition que l’autre en fasse autant. Le Léviathan insiste sur le fait que cette convention de chacun avec chacun dépasse l’idée d’un simple accord ou consensus, en ce qu’elle unit la multitude (les contractants) « en une seule personne appelée République ». C’est donc par un même pacte que se constitue la société civile et que s’institue le pouvoir souverain. Hobbes ne distingue pas entre société civile et Etat. Le souverain, bénéficiaire de ce pacte, n’est, quant à lui, lié en aucune manière par les sujets et il dispose d’un pouvoir absolu sur eux. Il n’y a donc pas lieu de parler de pacte de soumission ou de contrat de gouvernement, puisque « la soumission incluse dans les clauses du covenant (convention) n’est que le moyen de réaliser l’union » Le contrat social de Hobbes n’est donc pas passé entre les sujets et le pouvoir souverain qui en est le bénéficiaire, mais entre tous les individus contraints de mettre fin à l’état de nature. Aussi, les contractants sont-ils liés au souverain de manière unilatérale, tandis que celui-ci reste à l’état de nature, et n’est en aucune manière engagé à l’égard des sujets et peut gouverner comme bon lui semble, à cette réserve près que « l’obligation qu’ont les sujets envers le souverain est réputée durer aussi longtemps, et pas plus, que le pouvoir par lequel celui-ci est apte à les protéger » C’est là davantage un principe de prudence que de droit : s’il ne veut pas susciter révoltes et guerres civiles, le souverain doit essayer d’agir de manière raisonnable et ne pas se laisser guider par l’arbitraire de ses caprices. Son pouvoir est absolu, cela ne veut pas dire qu’il est sans conditions.
Pufendorf, sensible au fait que le souverain n’est pas engagé par le contrat, reproche à Hobbes de faire la théorie du despotisme. Aussi propose-t-il de distinguer deux pactes, le pacte d’association par lequel les hommes décident de s’associer à l’unanimité, et le pacte de soumission par lequel les contractants renoncent à une partie de leur liberté naturelle en faveur du souverain. Le premier pacte doit se faire à l’unanimité, chacun décidant librement de faire partie de l’Etat et nul ne pouvant y être contraint. De ce premier pacte résulte une société « qui représente les commencements et l’ébauche d’un Etat » Il doit s’accompagner d’un décret, ou « ordonnance par laquelle on règle la forme du gouvernement », lequel ne suppose plus l’unanimité, mais la simple majorité des voix. Vient ensuite une deuxième convention qui a pour objet de « conférer le pouvoir de gouverner la société ». C’est ce dernier contrat qui est le plus important aux yeux de Pufendorf, puisqu’il lie le souverain et les citoyens par une promesse réciproque : fidèle obéissance au souverain d’un côté, engagement à veiller avec soin au bien public de l’autre.
Locke prend aussi pour point de départ de sa description de la genèse des sociétés civiles l’idée d’un état de nature qu’il décrit dans le Second Traité du gouvernement civil. L’homme doit y suivre la loi naturelle qui veut que Dieu n’ait pas créé les hommes pour qu’ils se détruisent. Aussi aucun homme n’aura-t-il de droit arbitraire et absolu sur la vie d’autrui pas plus que sur sa propre vie, celle-ci n’appartenant qu’à son créateur. La loi naturelle interdit donc aussi bien de se suicider que de se vendre, elle interdit en outre d’attenter à la vie, à la liberté naturelle ou aux biens d’autrui. Suscitant l’avarice et la convoitise, c’est l’apparition de l’argent qui introduit un déséquilibre dans l’état de nature, en altérant « la valeur intrinsèque des choses qui dépendait seulement de leur utilité pour la vie » Ainsi, l’argent porte atteinte à l’équilibre des rapports entre l’homme et la nature, et entraîne l’humanité au bord de la guerre. Pour l’éviter, les hommes vont quitter l’état de nature et se mettre en société afin de constituer une communauté unique. Le pacte aura donc pour objet la préservation réciproque de la vie, des libertés et des propriétés de chacun des contractants. Le pacte d’association lockien repose sur le consentement, au moins implicite (il peut aussi bien être tacite qu’exprimé), d’hommes libres qui conservent le droit de quitter la société civile q’ils en jugent le fonctionnement déraisonnable. C’est donc du pacte d’association que dépend l’unité de la société civile, et non, comme chez Hobbes, de l’unité de la personne morale du souverain. Ainsi le peuple, en gardant toujours le droit de révoquer les magistrats, préserve son autonomie par rapport au gouvernement. Le risque de despotisme est ainsi écarté car il serait la négation du pacte, lequel n’a d’autre fonction que de donner au corps social le pouvoir nécessaire à la poursuite des fins que sont le bien commun est la préservation des droits naturels de l’individu.
Dans le Contrat social, Rousseau repousse les diverses théories qui dissocient plus ou moins subtilement pacte d’association et pacte de gouvernement. Pourtant, dans le Discours sur l’inégalité, il avait bien distingué le pacte d’association du pacte de gouvernement. Mais il cherchait alors à rendre compte des étapes hypothétiques de la formation des sociétés humaines. Ce qui ne l’a pas empêché de critiquer le pseudo-contrat social qu’est le pacte d’association civile, dont l’utilité est de mettre fin à l’état de guerre. Le Discours sur l’origine et les fondements del’inégalité parmi les hommes le décrit comme une duperie des riches et des puissants qui veulent rendre légitimes leurs usurpations et institutionnaliser l’inégalité. Ce pacte d’association n’est qu’un pseudo-contrat, permettant au fort d’asservir le faible, au riche de maintenir le pauvre dans sa misère. Le pacte de gouvernement, quant à lui, est un vrai contrat servant de fondement à tous les autres, mais Rousseau montre les effets néfastes du partage de la souveraineté qu’il implique. Le Contrat social, en se proposant d’examiner le droit et non le fait, se place à un autre point de vue. Il ne s’agit plus d’interroger l’origine des sociétés existantes, mais le fondement légitime de l’autorité civile. Il ne faut donc pas confondre les pactes d’association et de gouvernement de l’histoire hypothétique du Discours sur l’inégalité et le pacte social du Contrat social. Dans la présentation qu’il en donne, le pacte social proprement dit est essentiellement un pacte d’association - « l’acte par lequel un peuple est un peuple »- et en aucune manière un pacte de sujétion. Car « il n’y a qu’un contrat dans l’Etat, c’est celui de l’association, et celui-là seul en exclut tout autre » Ce pacte social n’est cependant pas un contrat ordinaire. Contrairement à celui de Hobbes, dans lequel les individus se dessaisissent ensemble de leurs pouvoirs et les transféraient à un seul et même souverain, le contrat rousseauiste n’engage pas les individus entre eux, mais ceux-ci avec le corps politique dont ils vont être membres. Sa « nature particulière » tient au fait qu’il contient un engagement réciproque du public avec les particuliers. Ainsi chaque individu, en soumettant sa volonté particulière à la direction de la volonté générale du corps social dont il est membre, ne fait « pour ainsi dire » que « contracter avec lui-même » sous deux points de vue différents. Si le fait que le corps du peuple soit à la fois l’un des contractants et le résultat immédiat du contrat ne va pas sans poser quelques difficultés, il permet cependant d’éviter certaines critiques d’ordre formel. En effet, puisque les « sujets et le souverain sont [...] les mêmes hommes considérés sous différents rapports », on pourrait reprocher au contrat social de ne pas respecter la règle de droit qui veut qu’on ne saurait être tenu par les engagements qu’on prend avec soi-même. Mais, comme le peuple en corps n’existe pas au moment même du contrat, chacun des particuliers peut bien s’engager par contrat avec la collectivité virtuelle, dont il sera membre. Et cela d’autant plus qu’il y a entre la volonté particulière des individus et la volonté générale du corps social une essentielle différence de nature, puisque la première tend à la recherche de son avantage privé et à l’inégalité, tandis que la seconde tend par nature au bien commun, qui est son seul bien, et à l’égalité, qui en est la condition. Il est de toute façon plus important pour Rousseau de montrer comment la liberté civile, sous la forme de l’autonomie que confère au citoyen sa soumission à la volonté générale, procède nécessairement du contrat, que de convaincre les juristes que celui-ci respecte bien les formes qui en font un contrat au sens strict.

Publié dans politique et morale

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