Le langage Fiche bac
Langage fiche bac
Sujets
Notre pensée pour s’exprimer passe-t-elle nécessairement par le langage ?
Peut-on tout dire ?
Le silence ne dit-il rien ?
Une langue universelle est-elle possible ?
Les mots disent-ils les choses ?
Les mots trahissent-ils l’essence des choses ?
Distinctions, définitions, problèmes
- Le langage, une langue, la
parole : 1) faculté de s’exprimer et communiquer ; 2) système de signes permettant l’expression et la communication d’informations ou
de messages (cf. « un langage ») ; 3) mise en œuvre individuelle du langage dans une langue déterminée, afin de dire quelque chose (ne nécessite pas la
voix !).
- le signe linguistique et les
différents types de signes : qui dit langage, dit signe ; qu’est-ce qu’un signe ?
a) définition générale : existence sensible
renvoyant à quelque chose d’absent, dont elle tient lieu (cette existence sensible n’est pas perçue pour elle-même : on perçoit ce à quoi elle renvoie, ce dont elle tient lieu) ; être
le signe de quelque chose, c’est l’exprimer
b) mais si tout langage suppose le signe, tout signe
est-il « linguistique » à proprement parler ? Non : il y a différents types de signes :
Signe linguistique
(Saussure)
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Unit, non un nom et une chose, mais un concept et une image acoustique, ou un signifié et un
signifiant :
Rapport : non naturel mais arbitraire, conventionnel/ culturel (pas de lien naturel entre la suite de sons « sœur » et
l’idée de sœur ; preuve : pas une seule langue)
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Signe naturel (l’indice)
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Le signifiant « ressemble » au signifié ou a un lien avec lui : exemples : la fièvre est l’indice/ le signe de la maladie, la fumée, du
feu, etc.
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Le signal
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Le signifiant est supposé susciter une réaction. Exemple : la sonnerie à la fin d’un cours, le dos d’âne (code de la route). S’il suppose un certain
apprentissage et n’est donc pas naturel mais conventionnel/ culturel, il n’est toutefois pas lié arbitrairement au signifié.
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Parler, c’est être capable de comprendre des signes linguistiques, ce qui suppose une faculté de représentation élaborée, abstraite, puisqu’on se sert de choses qui
renvoient à des « choses » absentes, et que ces choses sont des idées, pas des choses particulières. Le langage a un lien très lâche avec la réalité, il renvoie à toute une élaboration
du monde par l’homme.
- langage et
culture : le langage est culturel, à la fois parce qu’il n’est pas naturel, rivé aux besoins, et nécessité par la nature (cf. convention,
arbitraire), mais aussi en ce que les mots qui le constituent sont des signes, des concepts. Ces concepts sont des définitions, des représentations générales et abstraites, qui renvoient à notre
façon de voir le monde, à nos connaissances, etc. Ce qui distingue les langues, ce n’est pas seulement la façon de dire ou d’écrire les mots, mais avant tout les idées auxquelles ils renvoient.
Exemples : Ainsi, le mot de « vache » n’a pas la même signification ou le même signifié pour nous occidentaux et en Inde (cf. caractère sacré).
Nous découpons le réel suivant nos connaissances, suivant nos besoins, notre façon de vivre… cf. Bergson.
- communiquer et
parler : cf. texte Descartes (la différence se comprend surtout à propos du problème du langage animal)
- penser et
parler : la pensée pré-existe-t-elle au langage ? peut-on penser indépendamment des mots ? On répondra (cf. Hegel)
que la pensée qui préexiste au langage n’est qu’une pensée confuse, qui se cherche : on ne peut penser avant d’avoir recours aux mots ; c’est que penser, ce n’est pas percevoir,
sentir, ou avoir conscience en général, mais c’est avoir une représentation générale et abstraite, une définition. NB : si le langage était accidentel dans la formation de
la pensée, alors, on dirait qu’il n’est qu’un outil de communication, qu’il ne sert que les besoins de la société, les besoins naturels (pas d’importance alors)
- rapports mots et choses
(ou : à quoi réfèrent les mots) : cf. signe linguistique, langage et culture : les mots ne réfèrent pas directement aux choses, au
monde ; mais ils y réfèrent par l’intermédiaire de nos idées, i.e., ils réfèrent primordialement à notre représentation du monde (cf. le concept).
On critique souvent la généralité des mots : trop communs, trop généraux, pour pouvoir dire toute la réalité (ce qui renvoie au problème « penser/
parler »), qui est individuelle. Ne disent que ce qui est commun aux choses, donc, que ce qui est « banal ». Cf. Bergson,
Nietzsche (versus Platon, Hegel). Cf. Nominalisme.
Textes
Descartes, Lettre à Newcastle : penser et parler ; penser et
communiquer ; langage animal
-parler c’est exprimer des pensées et seul un être conscient, doué d’une âme, a des pensées : privilège de l’homme par rapport aux animaux
- les animaux expriment, communiquent
mais ne parlent pas : le contenu de ce qui est échangé est en effet des cris, des passions, des sentiments, etc. ; c’est un phénomène passif, réactif, instinctif ; l’homme, lui,
non seulement exprime des pensées, mais le fait consciemment, intentionnellement, volontairement
- à mettre en parallèle avec la danse
des abeilles ( K. Von Frisch,Vie et moeurs des abeilles) : les abeilles ont un système de signaux codé qui leur permet de s’échanger des info au
sujet de l’emplacement de pollen ; mais on dira qu’elles ne parlent pas à proprement parler parce que c’est de l’ordre de l’instinct ; elles ne peuvent se servir de ces signes dans un
autre contexte ; c’est quelque chose de naturel et de lié aux conditions de survie (une seule condition d’utilisation) ; et surtout, ne permettent pas le dialogue : elles
déclenchent une réaction chez les autres membres de la même espèce
Rousseau : origine du langage : besoins ?
Hegel, Philosophie de l’esprit : penser et parler
« C'est dans les mots que nous pensons. Nous n'avons conscience de nos pensées déterminées et réelles que
lorsque nous leur donnons la forme objective, que nous nous les différencions de notre intériorité, et par suite, nous les marquons d'une forme externe, mais d'une forme qui contient
aussi de caractère de l'activité interne la plus haute. (…) Et, il est également absurde de considérer comme un désavantage et comme un défaut de la pensée cette nécessité qui lie
celle-ci au mot. On croit ordinairement, il est vrai, que ce qu'il y a de plus haut, c'est l'ineffable. Mais c'est là une opinion superficielle et sans fondement ; car en réalité,
l'ineffable, c'est la pensée obscure, la pensée à l'état de fermentation, et ce qui ne devient clair que lorsqu'elle trouve le mot. Ainsi le mot donne à la pensée son existence la plus
haute et la plus vraie.
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Bergson : penser et parler ; langage et réalité ; concept
Pour tout dire, nous ne voyons pas les choses mêmes ; nous nous bornons, le plus souvent, àlire des étiquettes collées sur elles. Cette tendance, issue du besoin, s'est encore accentuée sous l'influence du langage. Car, les mots (à l'exception
des noms propres) désignent tous des genres. Le mot, qui ne note de la chose que sa fonction la plus commune et son aspect banal, s'insinue entre elle et nous, et en masquerait la forme
à nos yeux si cette forme ne se dissimulait déjà derrière les besoins qui ont créé le mot lui-même.
Et ce ne sont pas seulement les objets extérieurs, ce sont aussi nos propres états d'âme qui se dérobent à nous dans ce
qu'ils ont d'intime, de personnel, d'originalement vécu. Quand nous éprouvons de l'amour ou de la haine, quand nous nous sentons joyeux ou tristes, est-ce bien notre sentiment lui-même
qui arrive à notre conscience, avec les milles nuances fugitives et les milles résonances profondes qui en font quelque chose d'absolument nôtre ? nous serions alors tous romanciers,
tous poètes, tous musiciens. Mais, le plus souvent nous n'apercevons de notre état d'âme que son déploiement extérieur. Nous ne saisissons de nos sentiments que leu aspect impersonnel,
celui que le langage a pu noter une fois pour toutes parce qu'il est à peu près le même, dans les mêmes conditions, pour tous les hommes. Ainsi, jusque dans notre propre individu,
l'individualité nous échappe.
Nous nous mouvons parmi des généralités et des symboles, comme en un champ clos où notre force se mesure utilement à d'autres forces ; et, fascinés par
l'action, attirés par elle pour notre plus grand bien, sur le terrain qu'elle s'est choisi, nous vivons dans une zone mitoyenne entre les choses et nous, extérieurement aux choses,
extérieurement aussi à nous-mêmes
(Extrait de Le Rire)
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